les artistes
la démarche
Des termes antinomiques, de nouveaux corps protéiformes, des gestualités inédites qu’il convenait de regarder en changeant de focale.
Pour cette raison, le projet s’est emparé de la dérision et d’une esthétique de l’absurde comme moyen pour se retrouver à bonne distance vis-à-vis de la réalité, une distance indispensable pour pouvoir attaquer ces paradoxes les uns après les autres.
Dans une démarche expérimentale nous avons également laissé place à un monde imaginaire, un ailleurs quelque peu onirique. Chaque participant, avec ses outils, ses mots, ses expressions, son corps et son vécu, a fait naître un contre-discours artistique et pluriel, une scénographie inédite pour des temps curieux.
Les artistes ont élaboré plusieurs approches plastiques et visuelles à travers des temps d’ateliers. Ainsi, si l’action proposée entendait au départ permettre aux publics
en situation de précarité sociale ou professionnelle d’objectiver cette période de crise, afin de poursuivre ou donner un nouveau sens à leur parcours, la participation de chacun et chacune s’est finalement transformée en une véritable appropriation du projet,
y compris dans sa dimension artistique,
faisant de CARE une oeuvre expérimentale
et collective.
L’exposition est l’étape finale de ce projet. Son aboutissement se fait à la fois pour marquer la fin d’une recherche artistique, mais également pour permettre aux participants d’aller au bout d’un projet commun, ainsi que de rendre possible un dialogue.
les œuvres
Denis Darzacq
Dans cette série, composée de moyens formats noirs et blancs et de grands formats couleurs, Denis Darzacq s’interroge sur la place de l’Homme dans la nature par temps de pandémie. Une succession de personnages tous plus énigmatiques les uns que les autres semblent émerger d’une forêt sauvage, primitive, dans des attitudes à la fois grotesques et gracieuses, emprunts d’une inquiétante étrangeté. Mystérieusement très incarnés, ils paraissent à la fois inaccessibles et proches. Des jeux de correspondances se mettent alors inexorablement en marche, portés par notre imaginaire collectif. On est ainsi projeté dans un univers quasi cinématographique, à mi-chemin entre Le magicien d’Oz et les films d’anticipation.
Ilona Mikneviciute
Avec la série Éléna, Émilie, Hélène, Jessie et Narcisse, Ilona Mikneviciute a souhaité proposer une version sculpturale des personnages incarnés par les costumes réalisés lors des ateliers participatifs. Extraits de leur contexte, ces parures, tour à tour armure, cocon ou apparition, renvoient tout autant à un univers fantastique, voire guerrier, qu’à un désir d’envol ou de réconfort. La froideur et la brillance du métal, ainsi que le choix des objets, jouent sur les dichotomies entre pesanteur et légèreté, agressivité et douceur,tricialité et préciosité, tout en amenant une matérialité tangible à un univers absurde, où l’humain peine à trouver sa place. Les titres des œuvres renvoient pourtant à des personnes bien réelles, devenues, le temps du projet, des personnages «hors du commun»,auxquels les sculptures rendent hommage.
Olivier Renouf
Avec The March, Olivier Renouf rejoue de façon presque littérale la pièce Seasons March de Pina Bausch, l’une des plus célèbres de la danseuse et chorégraphe allemande décédée en 2009. Dans la performance d’origine, chaque saison est représentée par des gestes simples, évoquant la nature : herbes, soleil, feuilles, arbres. La chorégraphe affectionnait ce genre de «procession» qui se propageait parfois jusque dans le public. Dans cette même idée de collaboration entre danseur et public, Olivier Renouf a souhaité ici que la farandole continue, emmenée par une gestuelle cette fois inspirée par les habitudes, attitudes, et fameux «gestes barrières», liés à la crise sanitaire. Ces petites séquences dansées cherchent à la fois de façon touchante et dérisoire à exprimer par le corps un sentiment collectif, entre contraintes et tentatives éperdues de recherche de liberté.